La section ABAKO de la commune de Kalamu annonce une réunion dans les locaux du YMCA pour le dimanche 4 Janvier 1959 à 14 heures. Cette réunion fait suite au meeting tenu une semaine avant, par les délégués á la conférence Panafricaine d’Accra pour laquelle KASA-VUBU n’avait pu obtenir un visa. Il faudrait noter le nouveau concept apparu lors de ces assises á savoir le Panafricanisme. L’on se demande alors qu’elle sera l’attitude de KASA-VUBU?
Il y a gros à parier que le président de l’ABAKO choisira cette occasion pour exprimer publiquement son point de vue, à une semaine de la déclaration gouvernementale annoncée par le ministre VAN HEMELRYCK pour le 13 Janvier. L’administration coloniale redoute les conséquences d’une surenchère politique aussi prévisible. Aussi, l’autorité interdit-elle la tenue de cette réunion.A la date susdite, KASA-VUBU, peu avant quinze heures, se rend à la place YMCA, y prononce une petite allocution pour calmer la population qui s’y était agglutinée en dépit de l’interdiction. La foule surrexcitée comprend à peine ce qu’il dit:
" La réunion sectionnaire d’aujourd’hui est reportée au 18 Janvier 1959. Vous avez tous le grand désir d’attendre l’essor de votre destinée. Vous avez demandé l’indépendance. Le gouvernement belge nous fera sa déclaration le 13 courant. Ayez confiance. Les représentants étudieront la réponse du gouvernement belge. Partez, et ayez foi en votre demande ". A peine le président de l’ABAKO a-t-il regagné sa demeure que la bagarre éclate. Echauffourées entre policiers et manifestants, le sang coule. Les incidents tournent à l’émeute générale. Après l’intervention de la Force Publique, le bilan se solde pour cette seule journée par des dizaines de morts et de blessés.
Pour les Européens, il n’y a aucun doute: le responsable de l’émeute ne peut-être que KASA-VUBU, l’homme qui hait le blanc, le xénophobe, celui qui excite le peuple contre l’autorité, l’ambitieux, le prétentieux. Les autorités judiciaires cèdent, elles aussi, au courant de l’opinion générale. Quant à l’administration, elle trouve enfin l’occasion de prendre sa revanche.
Dès le 5 Janvier, sous prétexte de " l’abstention de KASA-VUBU devant les désordres survenus dans sa commune" , il est revoqué de ses fonctions de bourgmestre et le Parquet lance à sa charge, un mandat d’amener. Mais KASA-VUBU n’est pas chez lui et il est introuvable. En attendant, on arrête les principaux leaders de l’ABAKO, tandis que d’autres se réfugient à Brazzaville pour y constituer un "comité de défense". Après quelques jours, KASA-VUBU vient se présenter lui-même aux autorités. Il est arrêté à son tour, et emprisonné. Il a été démontré, depuis que ces arrestations ont constitué une erreur, non seulement sur le plan politique, mais également sur le plan judiciaire.Le ministre VAN HEMELRYCK s’en rend compte, et devant la mauvaise volonté de l’administration coloniale, vient lui-même à Léopoldville libérer KASA-VUBU.
En Belgique, les événements du 4 Janvier 1959 provoquent une sorte d’effondrement. D’un coup, c’est tout le "Congo dream", le grand rêve belge d’une colonie modèle et harmonieuse qui s’écroule brusquement. L’opinion publique s’inquiète. Puisque la colonisation parfaite n’est plus possible, une décolonisation parfaite n’est-elle pas à envisager? En tout cas, plus d’émeutes, plus de répression, plus de sang, estime en gros le peuple belge.Finalement, le parlement belge décide l’envoi au Congo d’une commission parlementaire d’enquête qui débarque à Léopoldville le 14 Janvier.
Le 13 se situe un événement d’une autre importance: la déclaration gouvernementale. Le ministre du Congo se décide à adopter toutes les conclusions du groupe de travail sauf sur un point, d’une portée psychologique considérable: la promesse explicite de la Belgique d’acheminer le Congo vers l’Indépendance. Le rapport ne contient pas le mot indépendant, tout en organisant la chose. Devant l’insistance des intellectuels congolais qui tiennent à voir figurer dans ce rapport le mot ” indépendance”, la déclaration gouvernementale est finalement précédée d’un message royal dont les passages significatifs peuvent se présenter comme suit:
"Notre résolution est aujourd’hui de conduire, sans atermoiements funestes, mais aussi sans précipitation inconsidérée les populations congolaises à l’indépendance, dans la prospérité et la paix".
"Dans un monde civilisé, l’indépendance est un statut qui réunit et garantit la liberté, l’ordre, le progrès. Elle ne se conçoit que moyennant des institutions solides et bien équilibrées; des cadres administratifs expérimentés; une organisation sociale, économique, financière bien assise aux mains de techniciens éprouvés; une formation intellectuelle et morale de la population sans laquelle un régime démocratique n’est que dérision, duperie et tyrannie".
Du 4 Janvier Á L’indépendance
" Ce beau discours était à peine prononcé que le gouvernement belge présentait sa déclaration qui consistait, à l’évidence, le premier des atermoiements funestes et la première précipitation inconsidérée. Le texte gouvernemental se trouvait dès l’abord dépassé et caduc et avait l’air d’un texte bâclé. La Belgique entendait instaurer au Congo un système semi-représentatif à trois degrés, tout en se réservant des possibilités de nomination à tous les échelons puisqu’à chaque fois, seule la majorité des membres serait élue. C’était là un système aussi boiteux et aussi peu apte à satisfaire les revendications des Congolais que le statut des villes. Etait-ce vraiment pour obtenir cela que le 4 Janvier 1959, le sang de leurs frères avait été répandu?
Après l’avoir libéré, le ministre VAN HEMELRYCK emmène KASA- VUBU avec lui en Belgique. Le leader de l’ABAKO y séjournera durant deux mois qu’il mettra à profit pour visiter la Belgique. A la fin de son séjour, il publie une déclaration où il prend position en faveur d’une "sorte de fédération des entités provinciales autonomes". Pour KASA-VUBU, la nation congolaise sera formée librement et de commun accord avec toutes les peuplades du Congo. Il s’agit de former ensemble une conscience nationale… imposée, l’unité du Congo demeurera vulnérable. La déclaration précise que les " Bakongo se réjouissent de ce que leurs compatriotes sont, à quelques nuances près, du même avis qu’eux dans l’expression de la volonté nationale.
De retour à Léopoldville, KASA-VUBU constate qu’une profonde divergence existe entre le ministre et l’administration coloniale. Le leader de l’ABAKO tente un dernier effort pour renouer le dialogue avec l’administration. Hélas, sa tentative échoue, et il se voit contraint à une attitude d’opposition systématique. C’est ainsi qu’il décide notamment le boycott des élections communales prévues pour le mois de Décembre 1959.
Les négociations que KASA-VUBU mène à ce sujet, à Léopoldville et à Bruxelles, avec le nouveau ministre du Congo, monsieur DE SCHRYVER n’aboutissent à aucun résultat.Par ailleurs, KASA-VUBU s’efforce de grouper autour de lui et de l’ABAKO les partis politiques qui partagent ses idées. C’est ainsi qu’au mois de Décembre 1959, il réunit à Kisantu un important congrès des partis ralliés à la thèse d’une fédération congolaise.Ainsi, il devenait le représentant non seulement de son propre parti, mais d’une véritable coalition nationale.
Quelques semaines plus tard, DE SCHRYVER réunit à Bruxelles la Table Ronde politique.Les principaux groupes en présence étaient: le Cartel, d’une part, le Parti Nationale du Progrès ( PNP), d’autre part et le groupe des chefs coutumiers. LE PNP avait été créé à Coquilhatville au mois de novembre et regroupait quelques partis "non extremistes". Parmi les personnalités du mouvement figuraient Paul BOLYA, Albert DELVAUX, Jean-Pierre DERICOYARD. Par ailleurs, la délégation des chefs coutumiers était fort importante car le gouvernement belge avait tenu à les associer en grand nombre aux travaux de la Table Ronde en tant que représentants de la "masse fidèle". D’autres partis étaient, à ce moment, plus importants par leur programme ou par les appuis dont ils disposaient dans certains milieux belges que par leur importance numérique: le (MNC) LUMUMBISTE et la CONAKAT.
Dès le départ, KASA-VUBU défendra des positions très dures. "(…)Nous sommes ici pour trancher toute la palabre. Il faut aller droit au problème. Les Congolais demandent la formation d’un gouvernement congolais".
KASA-VUBU demande également l’organisation immédiate des élections législatives. Il dénie à la conférence le droit de discuter des structures du Congo.Il réclamait que la Table Ronde s’érige en constituante: ainsi, il traduit son souci de voir le Congo doté d’une constitution qui soit l’oeuvre des Congolais eux-mêmes.La conférence ayant rejeté cette proposition, KASA-VUBU, pendant plusieurs journées refusera d’y siéger. La conférence de la Table Ronde se termine par l’adoption de seize résolutions qui doivent servir à l’élaboration, par la Belgique, d’une "loi fondamentale" provisoire.
Une large décentralisation est assurée par la résolution n°1 qui annonce déjà une "loi fondamentale" de type fédéral, bien que les mots "Etat fédérés" ne figurent pas dans le texte.Une autre résolution importante est celle relative au chef de l’Etat qui devra être désigné avant le 30 Juin, par les Chambres congolaises.Enfin, l’idée d’un gouvernement provisoire est réalisée en partie par la création de Collèges Exécutifs, à l’échelon du Gouvernement Général et des Provinces qui doivent permettre aux congolais de s’initier aux réalités du pouvoir.Après la Table Ronde fut installé à Léopoldville un Collège exécutif général, partageant avec le Gouverneur le pouvoir de décision. KASA-VUBU est chargé plus particulièrement des questions économiques et financières.Aux élections législatives de Mai 1960, l’ABAKO remporte tous les sièges dans le Bas-Congo et trois sièges sur quatre à Léopoldville.
Deux regroupements politiques se forment, l’un autour du Mouvement National Congolais de Patrice LUMUMBA, l’autre sous l’appellation Cartel d’Union National, autour de KASA-VUBU. LUMUMBA, désigné comme formateur, obtient la confiance des Chambres le 23 Juin par 74 voix sur 131.Le lendemain, Joseph KASA-VUBU est élu chef de l’Etat, par les Chambres réunies. Il obtient 159 voix sur 213.
Le 21, devant les Chambres réunies, le président KASA-VUBU prête le serment suivant: "je jure d’observer les lois de la nation congolaise, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire".
Les Lendemains De L’indépendance
Trente Juin 1960. Le jour même de la proclamation de l’Indépendance, l’équivoque de la politique belge de décolonisation et la volonté du gouvernement congolais de ne souffrir en rien que le paternalisme belge survive encore de quelque manière font éclater à la face du monde un désaccord profond entre les deux pays.
Le 30 Juin a lieu, au palais de la Nation, la proclamation solennelle de l’Indépendance. Le roi des belges déclare que son pays est heureux d’avoir donné au Congo, malgré les plus grandes difficultés, les éléments indispensables à l’armature d’un pays en marche vers la voie du développement.Conclusion de ce panégyrique : "c’est à vous qu’il appartient maintenant de démontrer que nous avons raison de vous faire confiance (…). Ne compromettez pas l’avenir par des réformes hâtives (…). N’ayez crainte de vous tourner vers nous".
De plus, ce discours était partial, non seulement dans le sens que mettra en relief le Premier ministre LUMUMBA, mais encore si l’on songe au bilan de ce que la Belgique avait omis de faire au Congo. Le gouvernement belge était bien placé pour savoir que, à part l’Indépendance, aucune des promesses que le roi avait faites, au nom de la Belgique, dans son message du 13 Janvier 1959, n’avait été réalisée au Congo à la date du 30 Juin 1960.
Dans son mot de circonstance, le président KASA-VUBU appelle une nouvelle fois les Congolais à s’unir dans une communauté d’efforts, de peines et de travail.Au mois de juillet, le Congo traverse une crise grave, qui s’accompagne d’une menace d’intervention étrangère.En compagnie de son premier ministre, le président s’efforce partout d’apaiser les esprits, tout en apportant son appui aux mesures prises par le gouvernement en vue de sauvegarder l’indépendance nationale.Le 5 Septembre 1960, devant l’aggravation de la situation, la menace d’une guerre civile et le massacre des populations innocentes, le président KASA-VUBU décide de faire usage de son droit constitutionnel de révoquer les membres du gouvernement. Le fait que le chef du gouvernement, LUMUMBA, se rebelle alors contre cette décision, engendre un conflit particulièrement pénible. Durant la période sombre qui suivit, le président KASA-VUBU s’efforça avec une inlassable patience de rétablir au Congo l’union des esprits et des coeurs.
Au cours des conférences politiques qui se tiennent successivement à Tananarive et à Coquilhaville, il parvient à sauvegarder l’intégrité du territoire et à restaurer progressivement l’unité du pays.
Les efforts du président sont couronnés par la constitution, au mois d’Août 1961, à Lovanium, d’un gouvernement d’union nationale présidé par monsieur Cyrille ADOULA.
A l’occasion de la réouverture du parlement, le président KASA-VUBU déclare : " Le parlement est une institution politique essentielle de notre pays. Il fallait le plus tôt possible lui permettre d’exercer à nouveau le pouvoir législatif et de contrôler le gouvernement nommé par le chef de l’Etat…
" C’est avec émotion, avec un véritable soupir de soulagement que je salue la rentrée en scène du Parlement. Messieurs les sénateurs, messieurs les députés, c’est aujourd’hui, je crois, la date la plus importante depuis notre indépendance, parce que, mûris et fortifiés par l’expérience du malheur, vous vous retrouvez tous, décidés à oublier suffisamment ce qui vous oppose, pour vouloir avant tout sauver le pays.C’est surtout votre volonté d’entente, c’est votre volonté d’aboutir qui ont permis la réouverture du parlement".
Dès lors, le chef de l’Etat joue un rôle prépondérant en vue d’assurer le fonctionnement harmonieux des institutions nationales. Les chambres législatives l’invitent régulièrement à inaugurer leurs sessions. Le gouvernement de son côté sollicite son appui.
Exerçant pleinement ses fonctions d’arbitre, le président, dans son message à la nation en date du 4 Novembre 1962, déclare notamment : " Nous savons l’inquiétude qui s’est emparée des membres du parlement à la suite de certaines rumeurs faisant état d’une prochaine dissolution des chambres législatives. Qu’ils soient pleinement rassurés. Il n’entre nullement dans nos intentions de procéder dans les circonstances actuelles, en vertu des pouvoirs que nous confère la loi, à une mise en vacances des chambres. Nous croyons cependant que députés et sénateurs ne peuvent, ne doivent pas ignorer cette opinion qui se crée ni la minimiser ; bien au contraire, toute leur action doit tendre à la corriger. Aussi, importe-t-il de rechercher la source du mal afin d’y apporter un remède efficace".
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